Un défilé de femmes fringantes : Christina Zimpel expose à la Schönfeld Gallery à Bruxelles
À Bruxelles, la Schönfeld Gallery présente la première exposition personnelle à la galerie de l’artiste australienne Christina Zimpel (°1961, vit et travaille à New York).
Ces deux derniers mois, Christina Zimpel a travaillé à ses oeuvres et préparé son expo dans la galerie même. La galerie est devenue son atelier. Résultat visible dès le 12 mars.
Dans The I’s Inside, l’Australienne Christina Zimpel propose une série de portraits de femmes énigmatiques, suggérant divers intérêts et sources d’inspiration. Le coloris non réaliste, souvent brutal, de Zimpel et ses formes plates, simplifiées, trahissent sa prédilection pour l’oeuvre des expressionnistes allemands et des fauves comme Henri Matisse. Le rose, omniprésent, n’est ni doux ni féminin, mais plutôt subversif: un rose fluo hérité du mouvement punk de sa jeunesse. De même, les coiffures tordues en chignon rappellent les séduisantes figures féminines d’Henri de Toulouse-Lautrec, et les silhouettes à contre-jour les photographies de rue de Vivian Maier.
Christina Zimpel a travaillé comme directrice artistique pour le magazine Vogue (tant l’américain que l’australien), où elle a employé de nombreux artistes et photographes. Elle a ensuite assisté son mari, le photographe Patric Shaw. Comme éditrice de ses photos, elle n’a pas tardé à comprendre, à force de se focaliser sur les détails, que les portraits vides de sens valent rarement la peine d’être regardés. Enfin, elle s’est consacrée à la réalisation de son oeuvre personnelle. Sa solide expérience dans la mode et le design a influencé sa pratique actuelle. Son oeuvre se caractérise par des couleurs fortes et des compositions graphiques audacieuses – elle travaille principalement à l’encre et à l’huile, mais recourt aussi à la peinture numérique. En 2018, la remise des ‘Oscars de la Mode’ du Council of Fashion Designers of America (Conseil des créateurs de mode américains), au Brooklyn Museum, a été rehaussée par les portraits, dus à Zimpel, des 30 nominés et personnes honorées. Zimpel a également collaboré avec des créateurs comme Michael Kors, Maison Kitsune et Lee Mathews Australia. Ses tableaux et dessins ont été exposés à New York, San Francisco, Paris et Sydney, et nombre de ses œuvres font partie de collections privées.
« J’ai une bibliothèque d’images dans la tête, explique Christina Zimpel. Ce sont les pensées qui font la différence entre un bon et un mauvais portrait. » Toutefois, les figures féminines de Zimpel ne sont ni de vraies dames ni des stéréotypes. Plutôt cinématographiques, elles dégagent une atmosphère. « On voit bien qu’elles pensent à quelque chose. Mais à quoi ? Qui sont-elles au juste, ces femmes, et que feront-elles tout à l’heure, une fois rentrées chez elles ? »
Un défilé de femmes fringantes. Des désaxées et des marginales, comme dans les portraits en noir et blanc de la photographe américaine Diane Arbus, mises en valeur sans raillerie ni critique, mais au contraire avec une immense admiration. Car ce ne sont peut-être pas les plus séduisantes des femmes, elles sont même loin de la perfection, « mais elles font de leur mieux », assure l’artiste. Elles font ressortir leurs atouts, s’habillent, soignent leur maquillage quelque peu exubérant et se couronnent de coiffures hors du commun. Sont-elles fières et sûres d’elles-mêmes, ou n’est-ce qu’une façade derrière laquelle elles se dissimulent ? En tout cas, elles cherchent à attirer notre attention. « Comme j’aimerais leur ressembler davantage, être un peu plus extravertie », avoue l’artiste. Dans une certaine mesure, elles sont donc ses alter egos, ses autoportraits (espérés). « Ces femmes ont des humeurs et des pensées qui pourraient bien être les miennes. » Ses tableaux à l’acrylique et à la gouache, Christina Zimpel les termine par une couche de peinture à l’huile, afin de donner aux femmes l’éclat qu’elles méritent.
Les portraits ne sont pas des instantanés pris à l’improviste, comme dans la photographie de rue. Non, ces femmes pleines d’assurance sont de toute évidence en train de poser. Le fond plat des tableaux évoque une toile dans un studio, et les accessoires, rares et sommaires, un décor de théâtre. Les femmes sont saisies en cet instant particulier qu’Henri Cartier-Bresson aurait appelé ‘le moment décisif’. « Le seul et unique moment où elles autorisent brièvement le spectateur à regarder dans leur tête », précise l’artiste. Leurs yeux accentués doivent nous y aider, car ils sont les fenêtres de leur âme. Leurs épaisses couches de maquillage et leurs vêtements dissimulent leur moi authentique. Car, Christina Zimpel le sait, « le moi est à l’intérieur », « the I’s inside ».
Christina Zimpel
The I's Inside
12 mars - 29 avril 2023
Schönfeld Gallery
Rivol, Chaussée de Waterloo 690, 1180 Bruxelles
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